On a déjà noté que Koumba Ndoffène était le fils de Souka Ndela et de Linguère Gnilane
Diogoye Diouf. Son règne fut glorieux et a été marqué par la grande victoire de Somb, sur Maba et ses
armées coalisées. En 1859, se situe « l’incident de Logandème (Fatick) », qui opposa Pinet-Laprade
aux guerriers de Koumba Ndoffène Diouf. Pinet-Laprade était installé à Atoff et Koumba Ndoffène à
Logandème, sous un baobab. Les coups de canon tirés par les Français firent tomber une grosse
branche du baobab qui, dans sa chute, tua un des adjoints de Koumba Ndoffène, Ndam Sanou, et en
blessa grièvement un autre, Diakhaté, lequel mourra par suite de sa blessure. Lorsque Koumba
Ndoffène apprit la nouvelle, il réunit son armée et interrogea les chefs : « devons-nous continuer le
combat contre un ennemi que nous ne voyons même pas, alors que le tir de nos fusils ne pourra pas
atteindre l’ennemi ? » Le grand Diaraf laissa le choix au roi seul. Celui-ci proposa alors de tenter un
arrangement avec un ennemi bien supérieur en armes. Koumba Ndoffène décida donc d’envoyer deux
émissaires pour négocier avec les Français. On réussit ainsi à conclure une paix solide, et Koumba
Ndoffène devint alors l’ami des Français. Pinet-Laprade établit une sorte de protectorat sur un Sine
soumis où les commerçants s’installeront plus nombreux, à Silif, Fatick, Nonane et N’Dangâne, en
payant les coutumes prévues au Buur-Sine.
La surprise de Keur Ngor
Le grand combat qui opposa Koumba Ndoffène aux troupes de Maba, à Somb, fut précédé par
une attaque-surprise du Sine, alors que le roi se trouvait à Keur Ngor, près de Dielem.
Aux premiers jours de la traite, 200 adolescents, qui avaient été circoncis à Somb Nomad,
devaient venir danser pour le roi à l’occasion de la fin de leur initiation. Or leur “jour” coïncida avec
le jour où le roi devait se rendre à Dielem pour y assister à des funérailles célébrées en l’honneur d’un
captif, nommé Dyé Tyass. Il avait fixé rendez-vous aux jeunes circoncis à Keur Ngor, près de
Dielem, où ils devaient danser. Le soir, Koumba Ndoffène alla à la rencontre des nouveaux circoncis
et l’on passa toute la nuit à fêter et à danser. À l’aube, Yacine Ndiaye, une captive, partit puiser de
l’eau au puits voisin de Diam Sarr (situé entre Keur Ngor, Diekna Tagdiam et Apinde Maroutte),
escortée par deux cavaliers. Il virent de nombreux cavaliers à proximité du puits, en train de prier.
Surpris par l’importance de la troupe répartie sur une longueur de 300 m, on ordonna à Yacine de
rentrer immédiatement et l’un des cavaliers se hâta d’aller prévenir le roi et lui dit qu’il y aurait une
“surprise”, car beaucoup de cavaliers étrangers se trouvaient tout près de là. Un des fils de Ngor
Ndiaye, Sedar Ndiamané Ndiaye, accompagné par un de ses frères, furent chargés d’aller vérifier si
l’armée était toujours au même endroit. Ils arrivèrent vers la fin de la prière et furent aperçus. On tira
sur eux et le frère de Sedar fut tué. Sedar retourna alors pour conseiller à Koumba Ndoffène de
s’éloigner. Le roi suivit ce conseil et monta sur son cheval, Péré ; il partit, accompagné par Ndiak
Latdjiguène Ndiaye, grand guerrier, et Amamalik Kod Diop, tous deux captifs de la couronne.
Quittant Keur Ngor ils passèrent devant le fétiche Samba Wura (non loin de Keur Ngor), puis firent
cesser les cérémonies de funérailles à Mbayakh Dielem, à leur passage. Ils continuèrent vers Mbotil,

puis Djirol et parvinrent à Ngapa Diakhâo où Ndiak Latdjiguène, aidé par les gens de Ngoulanguème-
Diakhâo, organisa la résistance. Lat-Dior pourchassa le roi et incendia tous les villages qu’il traversa.

Il n’est pas vrai que Koumba Ndoffène a été escorté, au cours de sa retraite, par 30 cavaliers et
qu’il partit à Ndoyombout pour s’y réfugier, comme le prétendent certaines traditions. Deux cavaliers seulement accompagnèrent le roi qui, de toute façon, n’a pas pu aller à Ndoyombout, car il était
interdit, sous peine de mort, à un souverain du Sine de voir seulement les arbres de Ndoyombout,
après son couronnement. À Ngapa Diakhâo, le heurt de la cavalerie de Lat-Dior et des gens de Sine
dura plusieurs heures, pendant lesquelles on avait fait battre les dioung-dioung du Sine (tam-tam de
guerre) et alerté ainsi tout le Sine qui vint en renfort. Lat-Dior ne put donc faire son entrée à Diakhâo,
comme il l’avait voulu, d’autant plus que les partisans de Latdjiguène augmentaient sans cesse. Il dut
bientôt se replier et, au cours de sa retraite, il vint à passer devant le fétiche royal, nommé Sane, où
une multitude d’abeilles fondit sur ses chevaux et ses cavaliers, ce qui entraîna
l’élimination de beaucoup de ses hommes.

Quand les soldats valides de Lat-Dior eurent réussi à se camoufler dans les taillis avoisinants, ils furent encerclés par les gens du Sine qui mirent le feu à cette broussaille. Mais Lat-Dior parvint à faire une brèche du côté de l’est et continua son repli. Il traversa ainsi Tioupane, résidence de la reine-mère, où il captura plusieurs grandes personnalités du Sine :Amad Said Ndiaye, Fatma Thioub, et Selbé Diouf, la fille de Koumba Ndoffène. Il continua alors son
chemin vers le Saloum pour y rejoindre Maba.
Il n’est pas vrai non plus que Woula Sanou et Ndam Sanou sont morts au cours de ces
événements. En effet, Woula Sanou est mort 8 ans après Koumba Ndoffène et a combattu aux côtés
du successeur de Koumba Ndoffène, Sanou Mone Faye, contre son rival Semou Mak Diouf, au cours
des guerres civiles qui suivirent la mort de Koumba Ndoffène. Quant à Ndam Sanou, on sait qu’il est
mort à Logandème-Fatick, lors de la canonnade des troupes de Pinet-Laprade. Les guerriers du Rip
n’ont pas pu avoir une vision globale du combat, car ils étaient divisés en trois groupes : le premier
s’est dirigé sur Tagdiam, où il s’est heurté aux hommes de Boukar Ngoné, de Buur Mbouma et de
Woula Sanou, Buur Poukham ; le deuxième, commandé par Abdou Ba, combattit vers Mône, Felan et
Djilassem ; le troisième, sous les ordres de Lat-Dior, fut repoussé comme les deux autres le jour même
de l’attaque et tous durent quitter le Sine.
Koumba Ndoffène ne participa pas au combat. Arrivée à Diakhâo, il se retira à Ndoffane Nomad
pour y préparer une résistance qu’il estimait plus difficile.
La bataille de Fandane-Thiouthioune : appelée « bataille de Somb »
Quelques mois après la première attaque du Sine par les guerriers de Maba, l’armée de l’Almamy
du Rip pénétra à nouveau dans le Sine par le sud-est. Vers le coucher du soleil, des éclaireurs chargés
de surveiller les frontières aperçurent aux abords du marigot nommé Sambane la troupe du marabout
qui y passait la nuit. Ils avertirent aussitôt les deux ardo (chefs des Peul) de Kora et de Tongo, qui
allèrent à leur tour vérifier les faits. Ils amenèrent avec eux beaucoup de lait pour le marabout et furent
reçus par celui-ci. Ils lui dirent qu’ils l’attendaient avec impatience, et que tous les Peul et les
Toucouleur du Sine et des environs seraient pour lui dans le combat qu’il mènerait contre les
malfaiteurs du /p. 728/ Buur Kumba Ndoffène. Ils conseillèrent à Maba d’attendre le chant du coq
pour se diriger vers Ndoffane Nomad. Les ardo prirent alors congé de Maba, mais au lieu de regagner
leurs domiciles respectifs, ils allèrent immédiatement rendre compte au Buur-Sine de toute leur
entrevue. Ce dernier put alors se préparer et fit avertir les gens de Thiouthioune en envoyant des
émissaires auprès d’Amad Ngoné Thiouthioune (le jeune frère de son père) pour lui rappeler qu’il
gardait précieusement le fusil que les saltigui avaient préparé et avec lequel il devait tirer le premier
coup de fusil sur Maba. Le père de Buur envoya ensuite son fils aîné, Semou Galo Diouf et son neveu,
Mbagne Somb Faye, vers Sambane où ils partirent sous la pluie et arrivèrent à l’aube. Postés à la
lisière du bois, ils ouvrirent le feu sur l’armée de Maba. Ces deux guerriers combattaient tout seuls,
avec leurs griots derriere eux. Leurs tirs de flanquement poussèrent Maba à les poursuivre jusqu’à
Somb où une forte résistance avait été préparée. Maba réussit toutefois à passer et atteignit
Thiouthioune, le village de Amad Ngoné où Buur Semou Galo, Gniba Dior Diouf, Madior Latdjigué,
Biram Diouf attendaient l’attaque. Le combat eut lieu entre Somb et Thiouthioune et dura les trois
quarts de la matinée. Vers midi, un saltigui, nommé Laba Boof, qui avait promis au Buur-Sine qu’il
ferait tomber la pluie et qu’il survolerait l’armée de Maba, tint parole : une grande pluie s’abattit sur le
champ de bataille. Surpris, les guerriers de Maba pénétrèrent dans les taillis qui entouraient l’étang de
Fandane. C’est à ce moment que Koumba Ndoffène, mis au courant du stratagème de Maba, quitta
Ndoffane Nomad, avec son armée et se dirigea vers Fandane. Avant son arrivée, Lat-Dior et Alboury

s’étaient retirés du combat ; au moment de tisbâr (prière de 2 heures de l’après-midi), ils allèrent voir
Maba pour lui faire part de leur inquiétude quant à l’issue du combat, car on avait lutté depuis le matin
sans emporter la décision alors que les dioung-dioung n’avaient même pas encore résonné. Ils
conclurent que les armées du Sine étaient trop fortes et laissèrent Maba poursuivre le combat. Arrivé
peu après la désertion de Lat-Dior et d’Alboury, Koumba Ndoffène se plaça sous un grand baobab où
il fit son serment de ne pas laisser Maba repartir vivant. Maba était encerclé : à l’est, par les gens de
Buumy Somb, au sud par les hommes du grand Diaraf, au nord-est par les guerriers de Buur Patar, au
nord par ceux de Sandigué Ndiob, à l’ouest, au nord-ouest et au sud-ouest par l’armée du Sine
proprement dite groupant les soldats de Lam Diafadj, de Buur Ngohé, de Buur Diarère, de Buur
Mbouma de Buur Mbadatte, du grand farba et des petits farba, ainsi que tous les autres
hommes de troupe. Après avoir prêté ce serment, une fusillade nourrie éclata au cours de laquelle
Buur-Sine, qui était sur son cheval Massamba, fut touché au poignet par un tireur placé sur un arbre.
Makhoukhédia Ngoné, le jeune frère de Boukar Ngoné qui avait été tué à Keur Ngor, éperonna son
cheval “Boudedioté” et chargea Maba. Lorsque Koumba Ndoffène arriva avec ses hommes, il vit les
deux hommes, sous un arbre nommé Wen en wolof, enlacés, les bras autour du cou, morts tous deux..
Le corps de Maba fut coupé en morceaux. C’est Makhoukhédia que l’on enterra à cette place même
que l’on considère à tort comme la tombe de Maba. Les morceaux du corps de Maba furent emmenés
et enterrés à travers tout le Sine, à Felir, Samba Toude, Ndialgué et vers Thiamassas. La peau qui
servait de tapis de prière au marabout et son Coran restèrent au Sine.
Au moment de la mort de Maba certains de ses soldats vivaient encore et continuaient la lutte sur
le front nord entre le secteur de Buur Patar et de Sandigué Ndiob. La plupart d’entre eux furent
capturés comme Mama Gallo et un nommé Bayeting Ba qui fondera Djilassem-Mbayène. Mama
Gallo fut libéré deux jours après la victoire du Sine pour aller raconter les événements dans son pays.
Quant au cheval de Maba “Repe Ndao”, il resta la propriété de Buur Patar. Aujourd’hui encore les
chants populaires du Sine célèbrent cette grande victoire de Koumba Ndoffène.
La fin de Koumba Ndoffène fut malheureuse : un jour qu’il était allé à Joal et qu’il avait bu, un
métis qui avait préparé son côtre pour s’enfuir le plus vite possible, tira de son embarcation sur le
Buur qui mourra de ce coup de fusil, à son retour à Diakhâo.

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